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Entretien avec Nadije Likaj, la dynamique cheffe de service des mesures PJM de l’Udaf04

Nadije Likaj dirige le service MPJM à l'Udaf04 depuis bientôt 10 ans. Elle nous explique ce poste aux multiples facettes

Une balance, symbole de justice

Bonjour Nadije, pouvez-vous nous dire quelle est votre fonction au sein de l’Udaf04 ?

Je suis cheffe de service en charge du service de Protection juridique des majeurs depuis 10 ans.

Pouvez-vous nous parler du parcours qui vous a amenée à travailler pour l’Udaf04 ?

Voilà 20 ans que je suis à l’Udaf04, avant ça j’étais juriste dans une association.

Pourquoi avez-vous choisi l’udaf ?

Au départ j’ai envoyé une candidature spontanée car cette structure touche beaucoup au droit et à l’accompagnement des personnes vulnérables. Ce sont deux domaines qui m’intéressaient.

J’ai été mandataire judiciaire pendant environ 7 ans puis un poste de juriste s’est ouvert à l’Udaf et j’ai postulé.

J’avais l’impression d’un travail répétitif car je travaillais avec des personnes en EPHAD. Je suis restée 3 ans comme juriste et depuis 2014 je suis cheffe de service. En septembre je fêterai mes 20 à l’Udaf !

De quoi est fait votre quotidien ?

Il n’y a pas de journée type car il faut s’adapter aux urgences du service et donc des personnes protégées. C’est difficile mais stimulant.

Je ne gère pas les mesures de protection, ce sont les mandataires judiciaires qui sont aidées d’assistantes et de comptables qui le font. Le suivi social et budgétaire est aussi assuré par les mandataires, l’administratif concerne les assistantes. Tous peuvent compter sur les comptables pour le côté financier.

Moi, je dois chapeauter tout ça et faire en sorte que ça fonctionne correctement pour que les mesures de protection soient correctement exercées. J’organise le service, je veille à son bon fonctionnement et j’affecte les nouvelles mesures sur les secteurs dont j’assure la gestion.

Je dois veiller à ce que nos missions restent bien dans le cadre.

Je suis un peu le chef d’orchestre du service

Le métier de mandataire est strictement encadré, déjà parce que nous prêtons serment au tribunal et aussi à cause de la loi de 2007. Le législateur a légiféré sur les mesures de protection et ça a fait du bien à la profession. Ça a mis un cadre qui n’existait pas et qui a mis les personnes au centre du dispositif de leur mesure. On a rendu leurs droits aux majeurs protégés. On n’a plus ce côté super tuteur ou super curateur. Cette perception venait de la loi de 1968 dans laquelle on parlait de majeur incapable. Tout était dit et il y avait un amalgame. Or, la mesure de protection n’entraîne que certaines incapacités juridiques, d’où le terme de personnes protégées.

Je dois aussi veiller à ce que les bons termes soient utilisés. Quand on a les bons termes, on a aussi la bonne posture professionnelle. Considérer l’autre comme une personne à protéger donne une autre prise en charge que de la considérer comme un majeur incapable.

Je dois veiller à la bonne application des textes, aux bons rendus auprès des tribunaux, à la bien traitance des majeurs protégés et à une prise en charge correcte dans le cadre des mesures de protection. Je dois aussi veiller à ce que les salariés travaillent dans des conditions optimales et dans une bonne ambiance.

L’Udaf04 engage sa responsabilité et on peut être directement mis en cause et condamnée

C’est l’Udaf qui est nommé mandataire judiciaire puis elle délègue les mesures de protection juridique aux mandataires-délégués qui agissent par délégation. On peut tous faire des erreurs mais l’erreur ne peut pas devenir la règle.

On prêtent tous serment d’exercer loyalement nos fonctions

Pouvez-vous nous parler de l’ambiance de travail à l’Udaf ?

Il y a eu des hauts et des bas avec parfois des frictions mais l’ambiance de travail est plutôt bonne. J’arrive à rire parfois et à détendre l’ambiance même si je dis les choses quand il le faut. Il y a parfois de l’agacement parce que j’ai l’impression de beaucoup répéter mais aussi une grande bienveillance de ma part.

Mon but est d’avoir une équipe qui tienne la route, qui s’entend bien, qui soit très solidaire et bienveillante. Je l’ai parfaitement chez les délégués maintenant

Pouvez-vous nous parler de la juriste, quel est son rôle ?

Il s’agit de Lindie Likaj. Elle s’occupe du volet juridique à partir du moment où il y a une difficulté. De nombreux majeurs protégés font l’objet de procédures pénales, civiles, pour des successions, des ventes… L’attaché juridique est chargée de vérifier les actes, afin que les droits des personnes soit totalement respecté. Elle peut, par exemple, signer chez le notaire. Elle est placée sous mon autorité.

Elle est très sollicitée car les demandes explosent.

Elle est un appui grâce à sa vision d’ensemble de la mesure parce qu’elle a les trois casquettes de délégué mandataire, de conseil pour l’ISTF et d’accompagnement des mineurs. Je peux compter sur elle car elle a cette connaissance du côté mandataire et du côté juridique

Comment arrivez-vous à décrocher de ce quotidien ? Comment arrivez-vous à faire la part des choses et créer un équilibre entre vie professionnelle et vie privée ?

Il faut des mois et des mois pour arriver à décrocher. Au début, on rêve de son travail. On rêve qu’on a oublié telle chose, qu’on n’a pas fait telle autre. C’est un métier qui est tellement riche et prenant parce qu’on gère de l’humain avec des personnes qui sont en difficulté et qui parfois ont une pathologie. Il y a toujours un moment où ça vient chercher quelque chose en soi. C’est là qu’il faut être en capacité de se demander si ça vient déborder sur soi ou pas. Les mandataires ont des séances d’analyse professionnelle afin de parler des situations qui les touchent parfois avec violence.

Il y a toujours un moment où ça vient chercher quelque chose chez soi

On arrive aussi à décrocher parce qu’on est une équipe. Les mandataires savent que je suis leur référente dans les situations compliquées mais il faut parfois que je me dise que ce sont aussi des dossiers à gérer. Cependant, au quotidien, pour les mandataires, c’est compliqué de prendre cette distance. Je les y aide ainsi que l’analyse de pratique.

Et puis, les mandataires travaillent en binômes ce qui permet aux deux « équipiers » d’avoir connaissance des dossiers, de pouvoir prendre le relais si nécessaire et de mieux comprendre une situation.

Est-ce que vous parvenez à décrocher à présent ?

J’y arrive mais ça n’empêche que j’y pense parfois pendant les vacances.

Et comment faites-vous pour y parvenir ?

Je marche avec mes sœurs. La dernière randonnée en date c’était près de Mirabeau et on le fait très régulièrement. Je bricole, je vois mes amis mais j’avoue que par moment, c’est difficile. Il y eu des vacances ou des soirs pendant lesquels j’ai dû travailler parce qu’il y avait urgence. Quand il y a des choses à faire, on les fait et puis c’est tout parce que le service doit continuer de tourner.

On a la casquette des super héros mais on n’est pas des super héros

J’apprends encore à décrocher mais ça n’est pas toujours évident parce que c’est un métier riche et prenant. Il est prenant parce que, pour moi, c’est le seul qui touche à tous les domaines : les contraintes de la mesure de protection et le côté social et humain avec ce qu’est la personne. De plus, on fait les budgets, on accompagne les personnes en justice, bref, on fait tout.

Paroles d’usagers du service PJM de l’Udaf04

Parce qu’ils sont les premiers concernés par les mesures du service de Protection juridique des majeurs (PJM), nous avons choisi de donner la parole aux bénéficiaires de ce service. Ils s’expriment ici à cœur ouvert et nous les remercions pour leur aimable participation.

Zoé

Je suis bénéficiaire depuis 15 ans et j’ai eu plusieurs mandataires mais j’espère que Laure va rester parce que je m’habitue à une personne. Après ça me perturbe et je dois recommencer. Elle m’aide avec mon budget, elle est douce et me comprend bien. Je me sens en confiance avec elle. Elle est à l’écoute de mes problèmes et de mes besoins et elle y répond bien. Elle ne peut pas tout faire et je le comprends tout à fait mais elle prend le temps de m’expliquer. Jusqu’à présent j’ai eu surtout des bonnes personnes comme mandataire.

Ça me convient d’être aidée, c’est moi qui l’ai demandé parce que j’ai eu des galères personnelles et du coup j’arrivais plus à gérer mon argent. Un jour j’ai craqué. J’en pouvais plus mais on m’a dit qu’il y avait des solutions. C’est l’assistante sociale qui m’a fait faire un dossier pour venir à l’Udaf04.

Je n’ai jamais regretté d’avoir demandé de l’aide, je suis bien.

Je ne suis pas sous contrainte, je suis semi-libre grâce à la curatelle renforcée. C’est mieux pour moi que la tutelle parce que c’est pas au compte-goutte. J’ai un budget par semaine et c’est moi qui décide ce que j’en fais. C’est que pour les grosses dépenses que je demande à ma mandataire. Et puis elle s’occupe de payer mon loyer et les autres factures comme le téléphone. Quand j’ai besoin d’autre chose j’appelle mais des fois c’est dur de les avoir au téléphone.

Mes biens sont protégés et, par exemple, si je veux faire un crédit, j’ai pas le droit et je peux pas avoir de coup de folie. C’est quelque chose que j’aime bien parce que, aussi personne ne pourra me voler. Financièrement je suis protégée. Et puis il y a un cadre. Eux (l’Udaf) sont soumis à des compte-rendus régulièrement au juge et je les remplis avec ma mandataire.

Laurence

Ça fait 6 ans que je suis au service PJM de l’Udaf04 et j’aime tout dans le service. Quand on a besoin d’eux, il sont là. C’est très bien. Je me sens protégée. Je me sens bien, en sécurité. Quand il y a un problème je les appelle. J’ai connu d’autres service PJM par mes parents mais pour moi, celui-là est très bien. Comme j’ai beaucoup de difficultés, ça m’aide d’avoir un mandataire. J’ai du mal à payer et tout ça et, du coup, c’est moi toute seule qui ait fait la demande pour être à l’Udaf04.

Par contre, ici ça manque de discrétion dans les boxes parce qu’on entend tout ce qui se passe à côté et ça j’aime pas.

Dans ma vie de tous les jours c’est très bien parce que ma mandataire m’aide pour les papiers. Elle me vire les sous une fois par semaine et elle m’aide pour fixer des rendez-vous pour moi ou pour mes enfants. Franchement, il n’y a aucun mauvais côté et j’adore ma mandataire. Je me sens très bien dans cette mesure, protégée, respectée. Quand je demande des choses à payer, des fois c’est pas possible, je comprends, je vais pas faire ma crise mais j’ai une maison et tout va bien. J’adore l’Udaf04, j’adore ma curatelle et en plus ma mandataire prend soin de mes enfants, c’est le pompon sur la cerise !

Bernard

L’accueil est sympa et pour avoir un rendez-vous ça va parce que c’est d’une fois sur l’autre; Par contre, pour avoir la curatelle au téléphone c’est galère parce que l’accueil au téléphone c’est ouvert de 9:00 à 12:00 et ils te rappellent pas. Après c’est pas de leur faute, ils ont du monde et du coup ils ne laissent pas passer les messages, mais bon, ça va.

La mesure de curatelle ça m’aide à gérer mes papiers, mes sous, mon loyer à payer, l’assurance de la trottinette, mon compte. Ma mandataire est aussi là pour déposer une plainte, pour mon appartement ou pour les galères avec mon propriétaire, au niveau budget. Après, des fois, quand je demande un supplément, ça c’est pénible parce que c’est pas toujours possible. Quand le budget est trop serré bin on peut rien faire et je fais avec ce que. Mais j’ai ma mandataire qui m’explique pourquoi c’est pas possible. J’ai des limites de budget et il faut que je fasse avec. Je peux pas faire autrement et ma mandataire elle fait ce qu’il faut.

Mais tout ce qui est mon quotidien, c’est moi qui décide comme me faire vacciner par exemple ou quand je vais aux urgences. C’est moi qui décide, si j’ai pas envie, j’y vais pas.

D’abord j’étais au foyer et puis ça a continué avec la PJM. J’ai connu deux mandataires et là, ma mandataire est correcte et ça se passe bien. Depuis le temps que je la connais. Je me sens respecté mais des fois c’est moi qui hausse le ton mais sinon ça va.

Jean-Michel

Ça fait longtemps que je suis au service PJM de l’Udaf. Les mandataires sont super sympas, ma curatrice est très aimable et très gentille mais avec celle d’avant ça n’allait pas. Laure m’aide pour mon budget et j’ai pas à me plaindre. Je suis bien.